La Bretagne et les USA

Ce qui est bien, avec le nouveau président américain, c’est qu’on ne s’ennuie jamais, avec lui. Il assure le show en permanence, et chaque jour est un festival du rire. Chacune de ses interviews est un déluge de gags. Par exemple, dans un entretien accordé à The Bild, le bonhomme a livré sa propre vision de l’Europe. Une vision intéressante : selon lui, l’Europe était un projet sans avenir. Pourtant, ses déclarations ont été prises au pied de la lettre par certains européens. La semaine dernière, j’ai en effet participé à un meeting à Vannes où j’ai eu l’occasion de parler de tout ça avec mes collègues. Et j’ai relevé que certains d’entre eux approuvaient les propos de l’homme. Ce qui me paraît assez fou, quand même : c’est jouer là contre son propre camp, et contre ses propres intérêts. Si Donald Trump raille l’Europe, il faut bien comprendre que c’est dans un but bien précis : il veut diviser pour mieux régner. Tout comme Poutine, il voudrait que les pays européens se dispersent aux quatre vents. Si les deux hommes partagent ce même but, ils le font pour des raisons distinctes, toutefois. Pour le dirigeant russe, il s’agit d ‘abattre cet écueil qu’est l’Europe, et qui n’a de cesse de limiter ses mouvements. Trump, en revanche, rêve plutôt d’isoler chaque pays européen à seule fin de pouvoir négocier en position de force des traités de libre échange. Contre un pays isolé, les Etats-Unis pourraient imposer des traités qui leur seraient très favorables. Le businessman de la Maison Blanche n’a en tête qu’une seule chose : les intérêts économiques de son pays. Mais selon moi, en critiquant aussi ouvertement l’Europe, Donald Trump fait preuve de bien peu d’intelligence en la matière. Il devrait songer au fait que l’Union européenne importe chaque année pour plus de 500 milliards de dollars de biens américains. Faire preuve d’aussi peu de tenue est donc complètement absurde. A vrai dire, Donald Trump ne semble avoir aucune vision d’ensemble du contexte géopolitique. Ses attaques ne volent vraiment pas haut. Et son entourage va avoir du boulot quand il devra lui signaler que ses coups de poker peuvent avoir des séquelles. Soit dit en passant, j’ai bien apprécié ce meeting. L’organisation a fait un travail vraiment remarquable et je vous laisse le contact de l’agence qui a organisé ce séminaire en Bretagne.

Un revenu universel de Benoît Hamon

Le candidat Benoit Hamon suggère d’attribuer un « revenu universel d’existence » de 650 € par mois sans préalable, spécialement de revenu, graduellement à toute la population. Sa dépense annuel à terme atteindrait 600 milliards d’euros, ce qui correspond à la 1/2 des affectations d’Etat. Le revenu universel a été évoqué par des fonctionnaires que certains désigneraient d’ultralibéraux, fréquemment en l’accolant à une charge corrélatif au revenu global pour le financer. Une charge au taux de 35 % saurait de la sorte verser une charge de 600 milliards d’euros. Cette formule, revenu universel et un impôt corrélatif, validerait, suivant ses auteurs, un standing de vie à minima à tout Français tout en l’incitant à bosser plus encore que dans la méthode existant. En effet, chaque argent complémentaire reçu par son occupation lui attribuerait 0.65 euros après impôt alors que, à présent, il encaisse en net malheureusement 0.43 euros globalement, parce qu’il juge abaisser ses indemnités sociales et alourdir ses niveaux d’impôts et charges. Pour les économistes, ce « revenu universel d’existence » commuterait la majorité des prestations sociales et des services publics dont la consommation est individualisable. Tout Français recevrait le minimum indispensable pour vivre, l’améliorerait par une fonction professionnelle, le consommerait pour des prestations de son choix et prémunierait de manière libre contre tous les risques, dont les persistants risques sociaux. La somme des provisions sociales arrivant approximativement 600 Md€, le revenu n’envenimerait donc pas les dépenses d’Etat et saurait être financé sans revaloriser les prélèvements obligatoires. Il faudrait simplement remplacer certains de ceux-ci, spécialement les contributions, par une contribution généralisée à 39 %. L’État renoncerait à intercéder pour délivrer des tâches aux français. Les portées de l’organisation d’un salaire d’existence sur la rentabilité des entreprises, la séduction du pays, l’engagement et l’responsabilité, ou davantage la fraude fiscale et administrative, deviendraient incroyables. Ce n’est forcément pas la folie du candidat Benoit Hamon, qui n’a pas annoncé l’abrogation de tâches publics. Il est possible de néanmoins concevoir que le revenu d’existence modifierait les seuils sociétaux (à peu près 23 Milliards euros) et les attributions familiales (12 Mds Euros), chaque enfant y donnant droit, cependant ces réductions de charges ne chambarderaient pas la réalité de la difficulté : il faudrait agrandir les prélèvements obligatoires d’à peu près 530 milliards €, en conséquence de 54.5 %. Les conséquences de la fondation d’un revenu d’existence sur l’efficience des entreprises économiques, l’attractivité du lieu, la participation et l’responsabilité, ou davantage la fraude aux impôts et administrative, deviendraient effroyables.

Ne pas se tromper de patriotisme

 

Les jours et les semaines passent. Et ces derniers temps la campagne présidentielle a doucement glissé vers le caniveau et le feuilleton, perdant l’essentiel de son intérêt.

En ce 13 février on ne pouvait donc que partager le vœu de Nicolas Beytout dans son éditorial de l’Opinion (1)⇓. Il est grand temps que s’organise le débat.

Deux semaines plus tôt, votre chroniqueur imaginait encore que les vraies questions allaient s’imposer, tout simplement parce qu’elles se posent au pays de façon cruciale.

De sorte que, le dimanche 29 janvier, étant cloué devant mon poste de télévision ma curiosité ou mon ahurissement passager m’avaient conduit à entendre l’expression coup sur coup de deux définitions du patriotisme. Je me surpris successivement, en effet, à visionner d’abord, et jusqu’au bout, un petit reportage consacré à Florian Philippot. Après quoi, sur La Chaîne Parlementaire, d’entendre le discours de La Villette de François Fillon.

Depuis ce dimanche, dois-je l’avouer, j’éprouve le sentiment d’avoir absorbé une dose maximale du feuilleton électoral, non que ces deux émissions aient manqué d’intérêt mais parce que visiblement les gros moyens de désinformation n’en ont rien retenu pour l’intérêt du citoyen.

Pour la première partie de cette après-midi dominicale, exceptionnellement télévisuelle, la découverte d’un personnage qui jusque-là ne m’était connu que superficiellement m’a surpris. Au delà de quelques déclarations et prises de positions plus urticantes que vraiment éclairantes, on se trouvait en présence d’une vraie cohérence, celle d’un fils du jacobinisme, venu de la gauche. Il se revendique certes du gaullisme, ce que l’on sait depuis le début, et qui peut faire sourire eu égard à l’histoire d’un parti, fondé il y a près d’un demi-siècle sur la dénonciation de la « vente de la France par De Gaulle en viager au parti communiste ».

Quand on l’écoute de bout en bout, aujourd’hui, on demeure frappé, au contraire, par cette sorte de complaisance, qui s’exprimait dans le programme commun de la gauche rédigé en son temps par Chevènement, un mentor que Philippot ne semble pas vouloir renier.

Quant au second discours, celui de François Fillon, les journalistes moralistes n’ont pas voulu voir que, s’adressant à ses partisans, il n’avait manqué ni de style, ni de détermination, ni de contenu. On nous assure que cet orateur est devenu inaudible : il fut pourtant entendu ce jour-là par des milliers de partisans, peu impressionnés eux-mêmes par les gazetiers et les radioteurs.

À propos de son intervention, qui m’a semblé éloquente, je laisse la parole à Libération du 30 janvier qui écrit : « Le bon discours de François Fillon à la Villette pourra-t-il le sauver ? Le candidat LR a multiplié les formules bien venues, les envolées électrisantes et les confessions tout en retenue vibrante. Le candidat de la droite n’est pas mort, loin de là, et il peut espérer survivre en tablant sur l’amnésie progressive de l’opinion et sur un dossier judiciaire qu’il pourra plaider (c’est à l’accusation de prouver l’emploi fictif). »

Or, ces quelques lignes qui disent pourtant bien ce qu’elles veulent dire, étaient noyées dans un commentaire plus général, basé sur des impressions virtuelles, suggérées par les supputations plus ou moins gratuites avancées, au conditionnel, par d’autres médias.

La vraie question centrale supposerait un examen de l’état réel du pays. Les gens lucides le demandent de plus en plus fortement.

Or, nous nous trouvons à un moment où l’étiquette patriotique a repris une certaine popularité. Elle fonctionne, hélas, à contre sens. Aucun penseur politique n’a plus fortement que Charles Maurras, ni plus intensément que lui, pensé en termes de patriotisme et il y a consacré des pages et des pages dont les meilleures se retrouvent dans son indispensable Dictionnaire Politique et Critique. (2)⇓

Or, contrairement à une partie de ceux qui, aujourd’hui, prétendent qu’ils continuent son combat, le mot véritable dont il habille sa doctrine est celui de nationalisme. Horresco referens nous dit Philippot pour qui nationaliste signifierait vouloir envoyer les chars à Berlin ! Maurras, qui pourtant avait beaucoup de mal à aimer fût-ce « quelques grands Germains candidats à la civilisation » (sic !!!), n’a jamais pensé en ces termes. Son nationalisme lutte contre l’ennemi intérieur, contre la décadence, contre la bêtise : cela fait déjà beaucoup de travail. Le nationalisme intégral, sous sa plume, est celui qui conclut à la nécessité de restaurer la monarchie.

Car le vrai patriotisme ce n’est pas celui du supporteur de l’équipe de France de rugby, c’est celui du citoyen qui se préoccupe de défendre le meilleur programme, les meilleures institutions susceptibles de redresser le pays.

À cet égard Maurras se montra toujours très critique à l’endroit de Paul Déroulède et de sa Ligue des Patriotes qui, sous la Troisième république, militent en faveur de l’élection du président au suffrage universel.

En 1908 il écrit : « L’élection du chef de l’État par le peuple nous a déjà livré en 1848, en 1852, 1870, à ces puissances de publicité et d’argent, à cet absurde gouvernement d’opinion… »« Le dictateur plébiscité est le serf de la ploutocratie comme Roossevelt (3)⇓

ou le serf de l’opinion publique comme Napoléon III. »

En 1909 il va jusqu’à conclure : « il va falloir sauver la France de Déroulède »

Signature

JG Malliarakis

Apostilles

  1. Les trois volumes sont édités dans la collection Climats chez Flammarion. ⇑
  2. cf Cahiers de la Quinzaine, n° 11, 1899⇑
  3. il s’agissait de Théodore Roosevelt… ⇑

Non à l’opération Macron

Tout est fait, c’est désormais parfaitement clair, pour préparer un second tour dont le vainqueur serait presque obligatoirement le candidat issu de l’écurie Hollande, le chouchou des médias, l’homme au programme vide, Macron. Certes quelques naïfs droitiers et centristes, éternels continuateurs de ceux que Beau de Loménie appelait les « grands habiles » misent à nouveau sur cette écurie et son poulain pour promouvoir ce qu’ils appellent les « réformes » sans jamais que soit précisé de quelles dispositions législatives il s’agirait.

Interrogeons-nous d’abord sur l’environnement institutionnel qu’utilise la manœuvre.

Tout est véhiculé bien sûr via les gros moyens de la désinformation, eux-mêmes fabriqués par une corporation qui veut nous faire croire qu’elle est objective, qui se veut intouchable, mais qui vote à gauche à plus de 85 %.

Précisons au besoin que la Cour des comptes quand elle ouvre les dossiers de France-Télévision, c’est-à-dire du cœur de ce quatrième pouvoir dépendant de l’exécutif en tire des conclusions effarantes. Les gens qui prétendent incarner la « morale » ne se l’appliquent certainement pas à eux-mêmes. (1)⇓

N’est-il pas pittoresque de s’interroger quant à une autre partie du pouvoir d’État, l’autorité judiciaire, et donc de se souvenir comment a été constitué le parquet national financier. Celui-ci a été créé par Christiane Taubira en 2014. Garde des sceaux celle-ci y a placé ses amis. Le procureur de ce parquet, Éliane Houlette, était commissaire du gouvernement auprès du Conseil des ventes volontaires. Elle doit sa brillante promotion à la ministre, laquelle a également constitué une équipe de procureurs adjoints et vice-procureurs parmi ses très proches … Rappelons aussi à ce sujet qu’en France, le parquet, et particulièrement le parquet national financier, n’est pas indépendant du pouvoir exécutif.

Les derniers soubresauts médiatiques de la campagne électorale n’ont donc, eux aussi, à cet égard, pas manqué de produire leurs effets sondagiers. Pour la première fois en effet un des deux plus récents sondages, celui commandé par Les Échos et Radio Classique à la société Elabe, plaçait, dès le 1er février, le candidat Macron favori de l’élection présidentielle où il arriverait second au premier tour. (2)⇓

Rien n’étant plus mouvant et plus incertain, en fait, qu’un sondage d’opinion, on ne disputera pas ici de la qualité respective des deux. On se contentera de noter que celui d’Elabe, institut présidé par Bernard Sananès, popularisé par Radio Classique et les Échos entre parfaitement dans le dispositif, réel et non virtuel de ce qu’il faut bien appeler l’opération Macron.

Ce à quoi vise ce mécanisme est vieux comme la cinquième république. Mais, depuis un demi-siècle, le projet n’avait jamais abouti au résultat désiré par ses promoteurs. Depuis le complot de l’Alma puis du cartel des Non de 1962 jusqu’aux premières illusions de la campagne Hollande de 2012 la grande idée de tous ces intervenants a, bel et bien, toujours été de tendre à un retour de la IVe république par une coalition socialo-centriste. Mais comme le pâté d’alouette cet assemblage inégal composera un cheval social démocrate et une alouette centriste voire droitière. Ne nous laissons pas prendre à cette candidature qui ne repose sur aucune doctrine, qui se refuse à développer, pardon à « dévoiler » un programme et qui laisse entendre qu’il acceptera généreusement les voix de la « droite orléaniste » (sic) en passant par « l’écologie réaliste » et le gaullisme social. Il prend cependant bien soin, quand il révèle, chichement, certains points de sa doctrine, globalment secrète, de ménager les pires poncifs du socialisme, tels que l’État stratège ou le modèle social, etc.

Il faut donc dire clairement non à cette opération Macron.

 

Droitisation, même au Maroc

Il y a quelques jours, j’ai suivi un incentive à Essaouira au Maroc, et mes collègues et moi avons pu débattre en long et en large d’un sujet particulièrement préoccupant : la droitisation du monde. Ou plutôt, son extrême-droitisation. L’élection de Trump n’en est à mon sens que l’une des conséquences. Mais dans notre pays aussi, le phénomène est en train de prendre une certaine ampleur. Depuis peu, par exemple, plusieurs candidats lors de la primaire de droite ont fait part de leur envie deréviser les manuels d’Histoire fournis par l’Education : leur but était d’en offrir une nouvelle mouture, une version non culpabilisante où l’histoire de France serait purement héroïque. François Fillon, par exemple, n’a pas hésité à donner en exemple le modèle chinois : un modèle où les enfants apprennent sur le bout des doigts la liste des dynasties chinoises et ne sont absolument pas encouragés à avoir le moindre recul critique. J’ai bien conscience que le contenu des cours donnés aux élèves ne mobilise pas les foules, et moi-même je m’en moque éperdument en règle générale, mais la question soulevée par Fillon et d’autres nous a tout de même fait passer un cap en terme de droitisation. Toute notre société est en train de basculer lentement vers l’extrême-droite. Qui aurait pu imaginer, il y a quelques années encore, que des politiciens d’envergure nationale évoqueraient sans sourciller de mettre en place un révisionnisme historique ? Peut-on encore parler de courtiser les électeurs du FN quand on en est à ce stade de séduction ? Ou souscrit-on tout simplement à la vision du Front National ? La rationalisation des idées de l’extrême-droite qui est à l’oeuvre dans les partis démocratiques représente à mon sens un réel danger, et il serait plus que temps de s’en préoccuper. Pourtant, personne ne s’en mêle, craignant d’être ridiculisé par tout le monde. Car oui, désormais, lorsqu’on évoque cette dérive, on se fait aussitôt taxer de bobo. Pour finir sur une note plus légère, j’aimerais signaler que j’ai beaucoup aimé cet incentive au Maroc. Tenez, je vous mets en lien l’agence qui l’a mis sur pied : les animations proposées étaient plutôt… étonnantes, mais pas inintéressantes.

On commence par un poême

Ce n’était pas quelque tableau de l’école flamande, un
David-Téniers, un Breughel d’Enfer, enfumé à n’y pas
voir le diable.

C’était un manuscrit rongé des rats par les bords, d’une
écriture toute enchevêtrée, et d’une encre bleue et rouge.

–  » Je soupçonne l’auteur, dit le Bibliophile, d’avoir
écu vers la fin du règne de Louis douze, ce roi de pater-
nelle et plantureuse mémoire.  »

 » Oui, continua-t-il d’un air grave et méditatif, oui,
il aura été clerc dans la maison des sires de Chateau-
vieux.  »

Ici, il feuilleta un énorme in-folio ayant pour titre le
Nobiliaire de France, dans lequel il ne trouva mentionnés
que les sires de Chateauneuf.

La gauche et son retour vers le pseudo-futurisme

Dans sa livraison déjà datée de février la revue « Philosophie Magazine » s’interroge : « De quoi la gauche est-elle malade » ? L’article vedette y est constitué d’un entretien par échange de courriels avec un philosophe que, je l’avoue, je ne connaissais pas jusque-là en la personne de Jean-Claude Michéa. Désormais retiré dans une grande ferme du sud ouest cet ancien professeur de philosophie de Montpellier cultive l’intransigeance vis-à-vis de ces « intellectuels postmodernes de gauche » qu’il appelle à combattre. Après avoir publié une « Impasse Adam Smith » en 2002 et « L’Empire du moindre mal » en 2007, il vient de livrer « Notre ennemi le Capital ». (1)⇓

Le titre pourrait se suffire à lui-même. La thèse centrale est ainsi résumée : « Si l’on veut réellement rassembler la grande majorité des classes populaires autour d’un programme de déconstruction graduelle du système capitaliste – et non pas simplement accroître ses privilèges électoraux, – il faut impérativement commencer par remettre en question ce vieux système de clivages fondé sur la confiance aveugle dans l’idée de progrès »… Car, pense-t-il, ce que l’on considère comme le progrès, aujourd’hui, c’est le contraire de ce en quoi les gauchistes veulent croire.

Au moins, avec un tel penseur, les choses sont claires. Et le lecteur se retrouve en pays de connaissance pataugeant dans les thèses que vulgarise Benoît Hamon dans le cadre de cette assemblée générale de l’UNEF, prolongée pour ne pas dire tardive, télévisée ce 25 janvier, sous prétexte de débattre en vue du deuxième tour des primaires de la Belle alliance populaire.

En fait ce courant d’idées ne remet donc pas seulement en cause ce qu’on appelle la gauche de gouvernement. Comme dans la chanson de Renaud il n’aime pas le travail, la justice et l’armée.

Certains pensent peut-être le problème entièrement nouveau. Déjà en 1899 Rosa Luxembourg concluait un article sur le cas Millerand : « L’entrée des socialistes dans un gouvernement bourgeois n’est pas comme on le croit, une conquête partielle de l’État bourgeois par les socialistes, mais une conquête partielle du parti socialiste par l’État bourgeois. »  (2)⇓

Elle répondait à deux articles de Jaurès dans La Petite République.

Ne disons pas que Benoît Hamon n’innove en rien. Il promet par exemple « une police des discriminations »… Ce progrès-là il ne le démentira jamais.

Une légère contradiction semble lui avoir échappé à lui et aux commentateurs, rapporteurs, intervenants et autres radioteurs dont les références ont accablé le débat.

Dire que le travail irait en se raréfiant fait partie de la panoplie ordinaire des pseudo-futuristes. Cet étrange argument fait du travail sinon une denrée ou une matière première, une ressource minière en quelque sorte. Or, prétendre que le besoin de travail n’existerait plus cela revient à dire que nous serions dans la société d’abondance, ce que démentent chaque jour les informations en provenance des favelas, des bidonvilles ou du Sahel. M. Hamon ou ses supporteurs ont-ils entendu parler des personnes âgées en grande dépendance ? Ils ne manquent probablement eux-mêmes jamais de lait : savent-ils comment et à quelle heure des éleveurs laitiers ont la gentillesse de traire les vaches pour eux ?

Les besoins des hommes en biens et services à travers le monde sont encore immenses.

Les pseudo-futurisme de gauche pense y répondre par l’utilisation des robots. Mais pour y pourvoir avec des robots encore faudra-t-il concevoir, construire et commander ces robots. Il est vrai que sur ce terrain M. Hamon ne sera pas d’un grand secours.

Signature

JG Malliarakis

Apostilles

  1. Les trois volumes sont édités dans la collection Climats chez Flammarion. ⇑
  2. cf Cahiers de la Quinzaine, n° 11, 1899⇑